Protection du territoire agricole et acceptabilité sociale : pistes de réflexion pour le Regroupement en énergie renouvelable Centre-du-Québec

LETTRE OUVERTE. Voici une lettre ouverte rédigée par Rachel Fahlman, Porte-parole de Vent d’élus, adressée au Regroupement Énergie renouvelable Centre-du-Québec.

Dans le dernier article de presse au sujet de votre regroupement, on peut lire que vous êtes en mode informatif, que vous avez  » posé des questions à gauche et à droite  » et que vous attendiez des réponses; on peut aussi lire que vous avez une grande ambition, soit celle de  » décarboner l’économie « . De plus, dans une lettre envoyée par Innergex le 24 mai à quelques propriétaires terriens de la MRC, aussi signataires de contrats d’octroi d’option, on peut lire que vous voulez  » adopter une démarche qui encouragera l’acceptabilité sociale tout en protégeant les activités agricoles… « .

À ce jour, le RERCQ n’a pas posé de questions au collectif Vent d’élus, dont je suis la fondatrice et qui représente 42 élus et ex-élus de 15 MRC. Les membres de Vent d’élus se sont unis, entre autres, pour assurer la protection du territoire agricole et la qualité de vie des citoyens face au développement éolien dans sa forme actuelle ainsi que pour, dans ce contexte, encourager la démocratie participative dans nos municipalités. Les membres du Regroupement n’ont pas non plus participé en grand nombre ni posé de questions au micro lors des nombreuses assemblées publiques organisées par des citoyens et des élus de notre MRC. C’est donc dans cette optique que je vous propose quelques pistes de réflexion qui répondront surement à certains de vos questionnements et vous aideront à atteindre vos objectifs déclarés.

La protection du territoire agricole

Dans un premier temps, je vous invite à lire le mémoire de Vent d’élus déposé en février dernier dans le cadre de la Consultation nationale sur le territoire et les activités agricoles – Agir pour nourrir le Québec de demain. Notre recommandation est claire : que l’objet premier de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAAQ) soit réaffirmé pour que, en zone verte, soit interdite toute implantation de parcs éoliens ou tout autre type d’infrastructures industrielles de développement énergétique. Les municipalités et les MRC ont d’ailleurs déjà le pouvoir d’agir en ce sens.

Dans un deuxième temps, dans l’optique de réaliser votre souhait de  » décarboner l’économie « ,  je vous encourage à contacter Jacques Nault, vice-président agronomie chez Logiag, qui a calculé que  » si on augmentait de 1% le taux de matière organique dans les sols cultivés de la Montérégie, ça compenserait pour toutes les émissions de carbone au cours d’une année au Québec « . Vous avez bien lu, toutes les émissions de carbone du Québec entier! Cette solution prometteuse et éprouvée est tout à fait réalisable ici dans la MRC de Nicolet-Yamaska. Nous vous avions d’ailleurs invités à assister à une conférence à ce sujet lors du colloque du 28 octobre 2023, où l’on apprenait qu’en prenant des démarches pour séquestrer du carbone dans les sols agricoles, on augmente aussi la biodiversité : c’est une solution gagnante-gagnante. 

Et finalement, afin de poursuivre vos démarches de protéger les terres agricoles, j’encourage fortement tous les membres du Regroupement à participer à la conférence du directeur général de l’UPA, Charles-Félix Ross,  » Éoliennes en milieu agricole : le jeu en vaut-il la chandelle?  » qui se tiendra la 12 juin prochain à Sainte-Perpétue. Vous pourrez ainsi profiter de la présence de M. Ross afin de lui poser des questions et d’obtenir des réponses sans délai. Je suis certaine qu’il connaît des mesures efficaces pour protéger le territoire agricole.

L’acceptabilité sociale

Quant à l’acceptabilité sociale, le livre incontournable à ce sujet est bien sûr celui de Marie-Ève Maillé et Pierre Batelier, L’acceptabilité sociale : sans oui, c’est non. Mme Maillé met même à la disposition de tous une Grille de l’acceptabilité sociale d’un projet à l’intention des décideurs. Comme indique Mme Maillé, plus les phénomènes sociaux nommés dans la grille  » sont observés relativement à un projet, plus celui-ci est susceptible de soulever des enjeux d’acceptabilité sociale. Les décideurs sont donc appelés à la prudence.  » Pour en nommer que quelques-uns de ces phénomènes présents dans notre MRC : la critique des processus d’information et de consultation mis en place par le promoteur; l’augmentation de la participation citoyenne aux séances du conseil municipal; la demande pour la tenue d’un référendum sur le territoire concerné; la judiciarisation du conflit.

On dirait qu’une grande majorité d’élus et même Michael Sabia semblent avoir de la difficulté à savoir comment obtenir l’acceptabilité sociale pour des projets éoliens. Après avoir moi-même constaté les effets dévastateurs qu’un manque d’acceptabilité sociale peut avoir sur le tissu social et sur les relations au sein des conseils municipaux, je me permets de partager avec le Regroupement quelques pistes de solution qui sont, d’après moi, les vraies clefs de l’acceptabilité sociale pour le développement éolien:

  • Bâtir les projets dans la transparence avec et pour les citoyens, pas dans l’opacité contre eux, ni pour des besoins industriels ou privés;
  • Obtenir le consentement explicite de la population locale, pas seulement l’appui des élus et des signataires de contrats avec les promoteurs;
  • Installer les éoliennes industrielles à l’extérieur des zones habitées et agricoles.

La suite

J’espère que ces quelques lignes auront permis au Regroupement d’obtenir quelques réponses à certaines de leurs questions. À titre de rappel, les membres de Vent d’élus demeurent disponibles pour répondre aux interrogations de tous, élus comme citoyens.

P.S. Si vous cherchez des réponses concernant les  » effets néfastes sur la santé (dérangement et nuisance à la qualité de vie)  » que causent le bruit, l’impact visuel, les ombres mouvantes et les lumières clignotantes des éoliennes et concernant également les risques de contamination chimique de l’eau souterraine durant la phase de construction, la toute nouvelle synthèse des connaissances de l’INSPQ au sujet des éoliennes est le document tout indiqué pour vous éclairer.

 

Rachel Fahlman

Conseillère municipale à Saint-Zéphirin-de-Courval

Porte-parole de Vent d’élus