Le changement climatique aurait ajouté 30 km/h à la puissance des ouragans
Selon une nouvelle étude scientifique publiée mercredi, le changement climatique provoqué par l’homme a renforcé les ouragans de l’Atlantique d’environ 29 kilomètres/heure au cours des six dernières années.
Pour la plupart des tempêtes ― quarante d’entre elles ―, le surcroît d’énergie dû au réchauffement des océans a permis de passer à la catégorie suivante d’ouragans, selon l’étude publiée dans la revue Environmental Research : Climate.
Selon la National Oceanic and Atmospheric Administration, une agence fédérale américaine, une tempête de catégorie 5 cause plus de 400 fois les dégâts d’un ouragan de catégorie 1, plus de 140 fois les dégâts d’un ouragan de catégorie 3 et plus de cinq fois les dégâts d’une tempête de catégorie 4.
Pour trois tempêtes ― dont celle de ce mois-ci, Rafael ― le facteur changement climatique a tellement accéléré la vitesse des vents que ceux-ci ont augmenté de deux catégories de tempête.
Il ne s’agit pas d’augmenter le nombre de tempêtes, mais d’accroître la puissance des pires d’entre elles, ont expliqué les auteurs.
«Nous savons que l’intensité de ces tempêtes provoque beaucoup plus de dégâts catastrophiques en général, a rappelé l’auteur principal de l’étude, Daniel Gifford, climatologue à Climate Central, qui effectue des recherches sur le réchauffement climatique. Les dégâts augmentent avec l’intensité.»
L’effet était particulièrement visible avec les tempêtes les plus violentes, notamment celles qui ont atteint le sommet de l’échelle de Saffir-Simpson pour l’intensité des tempêtes, soit les tempêtes de catégorie 5. L’étude a porté sur la période allant de 2019 à 2023, mais les auteurs ont ensuite procédé à une rapide addition des tempêtes nommées cette année, qui ont toutes été renforcées en raison du changement climatique.
«Nous avons eu deux tempêtes de catégorie 5 en 2024, a dit M. Gifford. Notre analyse montre que nous n’aurions eu aucune tempête de catégorie 5 sans le changement climatique causé par l’homme.»
Les trois tempêtes les plus dévastatrices de cette année – Beryl, Helene et Milton – ont augmenté respectivement de 29 kilomètres/heure, 26 kilomètres/heure et 39 kilomètres/heure en raison du changement climatique, ont indiqué les auteurs. Une autre étude réalisée par World Weather Attribution avait estimé que la vitesse du vent d’Helene avait augmenté d’environ 21 kilomètres/heure, ce qui est proche, a déclaré Friederike Otto, climatologue à l’Imperial College de Londres, qui coordonne l’équipe de WWA et a fait l’éloge du travail de Climate Central.
«Il est tout à fait logique, d’un point de vue fondamental, que nous ayons ajouté plus d’énergie au système, a estimé Rick Spinrad, chef de la National Oceanic and Atmospheric Administration, lors des négociations des Nations unies sur le climat à Bakou, en Azerbaïdjan.
«Le changement va se manifester en termes de ce que nous voyons déjà. L’ouragan Helene, d’un diamètre de 800 kilomètres, était énorme. Nous allons voir des changements en termes de vitesse de ces tempêtes. Nous allons voir des changements en ce qui concerne l’ouragan Milton, qui a engendré tant de tornades ».
Depuis 2019, huit tempêtes – Humberto en 2019, Zeta en 2020, Sam et Larry en 2021, Earl en 2022, Franklin en 2023 et Isaac et Rafael en 2024 – ont vu leur vitesse de vent augmenter d’au moins 40 kilomètres/heure. Humberto et Zeta ont gagné le plus : 50 kilomètres/heure.
Dans 85 % des tempêtes étudiées au cours des six dernières années, les auteurs ont constaté une empreinte du changement climatique dans la force des tempêtes, a déclaré M. Gifford.
Les eaux chaudes sont le principal carburant des ouragans. Plus l’Atlantique, les Caraïbes et le golfe du Mexique se réchauffent, plus l’énergie potentielle des tempêtes augmente. D’autres facteurs, tels que les vents latéraux à haute altitude et l’air sec, peuvent affaiblir les ouragans.
Les eaux dans la zone des ouragans ont augmenté de 1,1 à 1,6 Celsius en général et jusqu’à 2,2 C en raison du changement climatique, a indiqué M. Gifford. Les experts le savent parce que Climate Central a utilisé des techniques scientifiquement reconnues pour suivre régulièrement le réchauffement des océans dû à la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel.
Cette technique consiste essentiellement à utiliser des simulations informatiques pour créer un monde fictif sans réchauffement d’origine humaine, puis à le comparer à la réalité actuelle, la différence étant due aux gaz à effet de serre. D’autres facteurs sont pris en compte, tels que la diminution de la pollution par les sulfates provenant de la navigation maritime, qui a contrebalancé une partie du réchauffement avant que le ciel ne s’éclaircisse davantage.
Pour passer d’eaux plus chaudes à des tempêtes plus fortes, les auteurs ont utilisé un calcul appelé intensité potentielle, qui est essentiellement la limite de vitesse d’une tempête donnée en fonction des conditions environnementales qui l’entourent, a expliqué M. Gifford.
Kerry Emanuel, expert en ouragans et professeur de météorologie au MIT, qui a été le premier à mesurer l’intensité potentielle, n’a pas participé à l’étude, mais a déclaré qu’elle était logique. Elle montre l’augmentation de la force des tempêtes qu’il avait prédite il y a 37 ans.
Des études antérieures ont montré que le changement climatique a accéléré l’intensification des ouragans et ralenti leur déplacement, ce qui a pour effet de déverser encore plus de pluie.