Une production maraîchère pas comme les autres

AGRICULTURE. C’est à Sainte-Marie-de-Blandford, l’an dernier, que Louis Ménard a décidé d’établir La Ferme Trotteuse, qu’il décrit comme un lieu de production alimentaire où le savoir ancestral du travail avec les chevaux rencontre la science agronomique de pointe.

Son objectif? Bâtir un système agricole efficace, résilient et dont l’empreinte écologique est négligeable.

Pour ce faire, il utilise la traction animale pour réaliser les travaux agricoles comme le labourage et le sarclage. Ses deux chevaux lui permettent aussi de faciliter certaines récoltes, sans compter que le pâturage est bien utile sur ses terres, que ce soit par les chevaux ou les poules, qui permettent également la fertilisation du sol.

Malgré qu’il travaille «à l’ancienne», Louis Ménard ne le fait pas dans l’optique un peu clichée de «l’agriculteur nostalgique», dit-il. Il le fait par choix. «Ce n’est pas parce que je travaille avec des chevaux que je ne veux pas ou ne peux pas être efficace. C’est un mode de vie différent, mais j’ai aussi des réalités économiques, comme tous les autres producteurs, soutient-il. Certains pensent que je fais le même travail que nos grands-parents, ce qui est faux. C’est vrai que j’utilise des chevaux, comme à l’époque, et que je fais tout à la main, mais j’ai beaucoup plus de produits et d’outils qu’autrefois.»

Pour lui, son projet représente une combinaison de principes écologistes et de passion pour la terre et les animaux. «Si je le faisais seulement pour des raisons écologiques, ce serait beaucoup de travail. J’aurais pu faire autrement, avec des tracteurs plus écologiques ou d’autres méthodes, dans le but de préserver l’environnement. Je le fais parce que je suis vraiment passionné et c’est une méthode que je trouve agréable», affirme le jeune entrepreneur de 26 ans, qui n’a qu’un seul employé.

Il ajoute par ailleurs que son volume de production n’est pas assez gros pour avoir de gros équipements. M. Ménard compte environ un hectare en culture, pour un total de six hectares incluant la culture, le pâturage, la prairie et la ferme. «Tout est fait à la main; je n’ai pas de machine pour récolter. J’ai tellement de variétés que ça ne vaut pas la peine de m’équiper en machinerie pour chaque spécialité.»

Il faut dire que La Ferme Trotteuse offre une trentaine de produits allant des légumes aux fines herbes, en passant par quelques fruits et des volailles.

Louis Ménard indique qu’il a différentes façons de faire sa mise en marché. D’une part, il fait partie des «fermiers de famille» d’Équiterre, en préparant des paniers de légumes bio pour les consommateurs qui ont adhéré au programme. Ensuite, ses produits sont offerts en kiosque sur le site de la ferme, dans un concept de libre-service disponible à tous les jours. Il est également présent au Marché public de Deschaillons pendant la période estivale. Enfin, il a une collaboration avec Le Temps d’une Pinte, une microbrasserie/bistro de Trois-Rivières, qui cuisine et sert ses produits.

Animal polyvalent

Pour Louis Ménard, travailler avec les chevaux comporte quelques avantages. «Le cheval est un animal polyvalent. En plus d’être utiles sur ma terre, je peux atteler mes chevaux pour sortir du bois; ce que tu peux difficilement faire avec un tracteur.»

Il soutient que la portion de travail avec un tracteur ou un cheval, pour un maraîcher, ne représente qu’un petit pourcentage. Pour lui, la technologie utilisée pour les tracteurs peut s’appliquer aux chevaux; il suffit seulement de développer ses outils. «Au fond, la différence entre un tracteur et un cheval, c’est seulement le moyen de locomotion», croit l’entrepreneur.

Cela dit, il admet que c’est différent comme ouvrage. «Je n’ai pas de changement d’huile à faire, mais je dois en prendre soin et laver leurs pattes! L’hiver, je dois aussi m’en occuper.»

«L’animal a son comportement et il y a plusieurs facteurs à considérer pour que le travail soit adéquat, reconnaît Louis Ménard. C’est sûr que ça donne des défis de plus. Ça demande beaucoup d’adaptation.»

Objectifs

D’ici 5 ans, Louis Ménard aimerait atteindre plusieurs objectifs: varier sa production, en ajoutant notamment un peu plus de fruits, augmenter son chiffre d’affaires, se concentrer à 100% à sa ferme, ainsi que passer de 15 à 20 semaines pour la durée de l’offre de ses paniers bio.

À plus court terme, il souhaite développer sa machinerie. «J’ai des outils d’époque et ils sont un peu archaïques. Disons que c’est resté avec la technologie de l’époque. La machinerie ne s’est pas adaptée avec les années, alors c’est important de développer mes outils pour gagner en efficacité.»

Chose certaine, il prévoit faire ça pour longtemps encore, «tant que j’aurai du plaisir à le faire!»

Un projet unique?

Louis Ménard estime à environ quatre le nombre de fermes au Québec dans le même genre que La Ferme Trotteuse. «Au Québec, on est en retard, dans un sens, car aux États-Unis, il y a vraiment une vague de retour à ce genre de production et de technologie. Il y a un intérêt qui se développe à ce niveau-là», fait savoir celui qui travaille une dizaine d’heures par jour, sept jours sur sept.

Pour bâtir son projet, il lui a donc fallu faire beaucoup de recherches, et cela lui demande encore beaucoup de temps.

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