Pour un frein du projet de loi 10
SANTÉ. Dans une lettre qu’elle adresse aujourd’hui aux députés libéraux, la Coalition solidarité santé leur demande de ne pas voter de bâillon pour l’adoption du projet de loi 10, mais plutôt de rappeler à l’ordre le ministre de la santé Gaétan Barrette pour qu’il retire son projet de loi et tienne de véritables consultations sur l’avenir du réseau public de santé et de services sociaux.
La Coalition réagit ainsi à la rumeur voulant que le gouvernement s’apprête à imposer un bâillon dans les prochains jours pour forcer l’adoption de son projet de loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux, notamment par l’abolition des agences régionales.
Dans les derniers mois, la Coalition a rencontré une vingtaine de députés, majoritairement du PLQ, à leurs bureaux de circonscription. Si certains ont laissé entendre qu’il n’y avait pas unanimité dans le caucus, la Coalition remarque que «beaucoup de ces députés étaient peu ou pas informés sur le projet de loi, sur ses impacts, sur les enjeux sous-tendus et les dangers qu’il entraîne, de même qu’à propos de l’opposition généralisée qui s’est manifestée en commission parlementaire.»
La Coalition se dit convaincue que le PL du ministre n’atteindra pas les objectifs visés. Par exemple, le ministre Barrette prétend que son projet de loi va faire économiser 220 millions de dollars, mais la Coalition rappelle que c’était aussi ce que prétendait Philippe Couillard il y a dix ans, en 2004, quand il a réalisé les fusions qui ont créé les CSSS.
Économies, quelles économies?
«Pourtant, depuis 10 ans, le budget de la santé a doublé, ce n’est pas ce qu’on pourrait appeler des économies!», fait remarquer Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition. La Coalition doute fort que poursuivre les fusions à plus grande échelle encore améliore la situation.
Autre élément que soulève la Coalition dans sa lettre: les contradictions dans le discours du ministre et de son gouvernement. Alors que l’article 1 du projet de loi définit comme objectif de «favoriser et de simplifier l’accès aux services pour la population», le ministre Barrette a déclaré à de très nombreuses reprises en commission parlementaire que son projet de loi n’était «pas fait pour s’adresser à l’accès» (Intervention du ministre Barrette, 12 novembre 2014 – 00:24:37 à 00:27:05).
Pire, le premier ministre a déclaré que le projet de loi allait supprimer «un niveau intermédiaire de gestion pour redonner l’argent pour les soins aux patients», déplore la Coalition. Pendant ce temps, le ministre Barrette déclarait de son côté à Radio-Canada que les 220 millions de dollars ne seraient pas réinvestis, mais serviraient à l’atteinte du déficit zéro. «Qui devons-nous croire? À qui la population doit-elle se fier ?», se questionne Jacques Benoit.
Mais ce qui inquiète le plus la Coalition c’est que le projet de loi 10 n’est qu’un élément du puzzle (PL 20, PL 28, et d’autres encore à venir) «constituant une réforme majeure qui modifiera profondément le système public de santé», prévient-elle.
«Le ministre nous demande de juger ça à la pièce et de lui faire confiance pour le reste», fait remarquer M. Benoit. «À la lueur de toutes ces contradictions, et de tous les enjeux que cela soulève, ça nous est impossible : nous n’avons plus confiance». M. Benoît a conclu ainsi: «Nous avons bâti ce système public pour avoir notre mot à dire sur notre santé, pas pour nous faire bâillonner! »