Louis Plamondon: quatre décennies au Parlement d’Ottawa

RÉGIONAL. Le Parlement d’Ottawa et les MRC de Pierre-de-Saurel, Bécancour et Nicolet-Yamaska n’ont plus de secret pour le député fédéral Louis Plamondon. Il y a déjà 40 ans qu’il en explore tous les recoins et qu’il y tisse des liens.

Louis Plamondon a été élu député le 4 septembre 1984. Depuis, il a toujours réussi à conserver son poste. Encore aujourd’hui, il demeure passionné par son travail. Et ce n’est pas parce qu’il a maintenant 81 ans qu’il entend réduire la cadence! « Je trouverais ça plate de ne pas être dans le feu de l’action », confie-t-il quand on lui demande s’il a l’intention de solliciter un treizième mandat consécutif : « Je suis pas mal embrayé pour me représenter! La santé est toujours un point d’interrogation, mais pour le moment, ça va bien. Comme je le fais à chaque élection, je vais d’abord passer un examen médical complet ».

Il n’en demeure pas moins que la relève potentielle demeure aux aguets. « Depuis un an environ, au moins cinq personnes intéressantes sont venues me voir pour me signifier leur intérêt au cas où je ne me représentais pas. Des gens intellectuellement forts, qui connaissent bien la politique fédérale », confie M. Plamondon, ajoutant que lorsqu’il décidera de tirer sa révérence, il aimerait bien faire campagne avec la relève et lui transmettre son bagage d’expériences. « J’aime ça, aller voir les gens! C’est ma deuxième famille, la politique. »

Force est d’admettre qu’il agit en conséquence. En effet, le doyen de la Chambre des communes demeure très actif et présent dans sa circonscription, qui s’est agrandie au fil du temps. « Toutes les fins de semaine, entre 6 et 10 activités, en moyenne, sont à mon horaire. Ce que j’aime le moins, c’est le trajet en auto; c’est long, parfois! Par exemple, entre Saint-Roch-de-Richelieu et Sainte-Françoise, ça prend deux heures et quart! Mais quand j’arrive, je connais tout le monde. On me parle, et ça fait que je suis au courant de tout ce qui se passe. »

Ce mode de vie lui convient parfaitement. Plus que la retraite, assurément. « Je ne sais pas ce que je ferais d’autre. En plus, je suis un bon patriote en demeurant en poste : autrement (une fois retraité), il faudrait que l’État me paie une pension en plus de payer un autre député! », lance-t-il en riant.

Son arrivée dans la région

Louis Plamondon s’est établi dans la région en septembre 1964; à Sorel, plus précisément. Il venait tout juste d’obtenir son diplôme en enseignement. « À l’époque, il y avait très peu d’emplois dans le domaine. Mais à Sorel, il y en avait, parce qu’on y vivait un boom économique, un peu comme celui qui se prépare présentement à Bécancour. Comme je n’avais pas d’attaches, j’y ai déménagé, puis j’ai commencé à m’impliquer dans tout. »

Entre autres, il a été président d’un centre communautaire, a siégé au conseil d’administration de l’Hôtel-Dieu, a cofondé le Club Lion et le Club Optimiste, s’est impliqué dans les Chevaliers de Colomb et a présidé la Chambre de commerce. « J’étais présent dans toutes les sphères : les affaires, le communautaire, le social. J’étais vraiment dans la circulation. »

C’est pour cette raison qu’il a été ciblé par son entourage comme candidat idéal pour faire de la politique. Lorsqu’il a été approché, il n’était pas convaincu de la chose. « Ils ont insisté une fois, deux fois et la troisième fois, je suis tombé dans le panneau; j’ai dit oui. »

Il faut dire aussi qu’à l’époque, le « beau risque » de René Lévesque lui parlait. « Ça me tentait [de me lancer] parce que j’étais en maudit après les libéraux, qui avaient rapatrié la Constitution de Londres au Canada, sans le consentement du Québec. Je trouvais que c’était un coup de poignard, malheureusement réalisé par des Québécois au sein du gouvernement Trudeau. J’avais ça sur le cœur. »

Sa campagne, menée comme membre du Parti progressiste-conservateur, n’a pas été de tout repos : « J’ai perdu 25 livres! J’ai fait mon financement moi-même, avec beaucoup de bénévoles. Puis, on a gagné l’élection avec 57% des voix. »

Il s’est ensuite mis au travail, porté par ses convictions, desquelles il n’a d’ailleurs jamais dérogé. En témoigne notamment sa démission du caucus progressiste-conservateur après l’échec de l’accord du lac Meech, qui l’a poussé à fonder, avec six autres députés, le Bloc Québécois en 1990. Ou encore, sa décision de quitter le bercail avec d’autres députés bloquistes, en 2018, pour manifester son désaccord avec la vision de la nouvelle cheffe Martine Ouellet, avant d’y revenir une fois celle-ci partie…

Bref, il a résisté à toutes sortes de tempêtes, ce qui l’a énergisé plutôt que de le décourager. « Si je n’avais pas eu tous ces défis-là, je n’aurais sans doute pas fait 40 ans », dit-il.

Aider les autres

« Être député, c’est beaucoup de travail. Je me fais dire souvent : je ne ferais pas ta job! Mais j’aime beaucoup rendre service et m’impliquer. C’est ce qui me nourrit », mentionne M. Plamondon.

Chaque semaine, il est appelé à régler plusieurs dossiers en lien avec le chômage, les impôts, les allocations familiales, les pensions de vieillesse, le supplément de revenu garanti et bien d’autres.

« Je prends le temps de bien regarder tous les dossiers. Je réponds moi-même à tous les courriels et je retourne personnellement tous les appels. J’essaie de parler à dix personnes par jour, cinq jours par semaine. Au bout de 50 semaines, ça fait 2500 personnes contactées, soit environ 10 000 personnes pendant un mandat de quatre ans. Ces personnes deviennent des haut-parleurs pour moi. Le contact direct, c’est ce qui assure la plus grande fidélité d’un électeur, à mon avis. »

La politique dans le sang

Louis Plamondon s’intéresse à la politique depuis toujours. Il se souvient encore de la première fois où il a pu exercer son droit de vote. « Je n’avais pas dormi la veille! Je votais différemment de mon père », raconte-t-il. « Aller voter, pour moi, c’était extraordinaire. Et j’aimais ça, écouter les résultats!  Aujourd’hui, ce n’est pas une priorité pour les jeunes. Pourtant, à l’âge de la révolution, choisir son gouvernement, c’est le premier geste à faire pour mener sa bataille! », exprime-t-il.

La politique à travers le temps

Selon lui, le métier de député s’est grandement transformé au cours des quatre dernières décennies. « En 1984, il n’y avait pas de téléphone cellulaire, pas d’Internet et même pas de fax! Les gens n’écrivaient pas 50 niaiseries sur Facebook. Ils prenaient le temps d’écrire une lettre et je recevais plus de visites. Avec les nouvelles technologies, par contre, c’est beaucoup plus accaparant. »

Monsieur Plamondon souligne aussi que les gens sont beaucoup plus directs lorsqu’ils s’adressent à lui. « Le prestige de député est disparu parce qu’il y a eu plusieurs scandales dans la politique de certains gouvernements. Rien pour redorer l’image, parce que les gens généralisent. Au moins, dans mon comté, les gens sont très accueillants, très fraternels et ouverts à me parler de tout sujet. Ils sont contents de me saluer et sont polis. »

Ses fiertés

Des 40 dernières années, Louis Plamondon retient plusieurs belles réalisations, dont la création du Musée des religions, de l’Auberge Godefroy, du parc Regard sur le fleuve et du Centre Le Rendez-vous, pour n’en nommer que quelques-unes.

Mais l’élément dont il est le plus fier est la fondation du Bloc Québécois, dans son propre comté. « C’était beaucoup de travail, mais tellement une belle réussite! »

Encore aujourd’hui, il demeure profondément convaincu de l’importance de l’indépendance du Québec : « J’ai espoir d’avoir un jour mon pays. Plus je siège à Ottawa, plus je me rends compte que [le Canada], ce n’est pas mon pays, même si je l’aime beaucoup et qu’il fait partie de mon histoire. Travailler ensemble, faire des ententes entre deux pays au lieu de se chicaner… ce serait tellement mieux! », croit-il.

Mais est-ce réaliste, l’indépendance du Québec? « Si j’avais la conviction que ça ne l’est pas, je m’en irais chez nous tout de suite! », répond-il.

Il croit même que les prochaines élections seront déterminantes. « Aucun parti ne dit qu’il va réussir à réformer la Constitution pour donner au Québec ce qu’il veut. [Alors] avec un gouvernement québécois souverainiste et un Bloc fort, ça pourrait réveiller bien des gens et mener à un référendum. D’ailleurs, si on avait déclenché un référendum en 1996, après s’être fait voler celui de 1995, on l’aurait gagné! Environ 64% des Québécois disaient alors qu’ils voulaient un nouveau référendum et qu’ils voteraient oui! Mais [Lucien] Bouchard (le chef du Bloc Québécois à l’époque) n’a pas eu le courage. Disons qu’il a hésité. Ça fait que ça peut arriver [qu’on le gagne]. »