Voir grand malgré la maladie
NICOLET. Atteinte de sclérose en plaques, Roxanne Mimeault pourrait s’apitoyer sur son sort et en vouloir à la vie. Elle a plutôt apprivoisé son diagnostic, tombé en 2009, alors qu’elle n’avait que 20 ans. Depuis, elle s’adapte à l’évolution de sa maladie et aux contraintes que celle-ci lui impose.
La résidente de Nicolet affiche un optimisme et un positivisme rafraîchissant face à ce défi envoyé par la vie.
«Ça ne m’a pas arrêtée. Quand j’ai eu mon diagnostic, j’étudiais au cégep de La Pocatière en Techniques de santé animale. Je voulais travailler avec les animaux. J’avais fait une technique équine également. Pendant quelques années, j’ai pu œuvrer dans ce domaine», raconte-t-elle.
Elle a travaillé à l’Aquarium de Québec, notamment auprès des ours, des renards, des phoques et des morses, puis en clinique vétérinaire à Rimouski. «Avec ma médication, c’était correct. Mais en 2014, j’ai eu une grosse poussée et j’ai paralysé partiellement du côté gauche. Je n’étais plus capable de rentrer au travail.»
Même si son état de santé s’est amélioré par la suite, elle a été obligée de revoir son plan de carrière en raison de certaines séquelles.
«Le travail en clinique était rendu trop physique, compte tenu de mon état. J’ai essayé de faire du travail de bureau, mais j’en suis venue à avoir des migraines chroniques. J’ai réalisé qu’un travail du lundi au vendredi, de 9h à 17h, ça ne convenait plus à ma situation. Je me fatigue beaucoup plus rapidement, et mon niveau d’énergie est en montagnes russes.»
L’artisanat comme porte de sortie
En arrêt de travail, elle a dû se trouver un passe-temps pour s’occuper et éviter de broyer du noir. Sa belle-mère lui a appris à tricoter.
«Je faisais des tuques, des mitaines, des foulards… À un moment donné, j’ai vu sur internet des toutous faits à la main. Je suis tombée sous leur charme! J’ai voulu en faire moi aussi. J’ai compris qu’ils étaient faits au crochet, alors j’ai appris la technique sur Youtube. J’avoue qu’au début, ils étaient vraiment laids, mais j’ai persévéré. Je voulais réussir. C’était une question d’ego!», sourit-elle.
À force de pratique, elle a progressé rapidement. «Je n’avais que ça à faire de mes journées. J’aimais ça, car je pouvais travailler à mon rythme. Je me rendais compte que dans pareille circonstance, j’étais correcte physiquement. J’ai aussi réalisé que je pouvais être vraiment productive dans une journée de travail, en autant que ce soit moi qui décide du moment où elle commence, se termine, et quand je prends des pauses.»
En admiration devant la qualité des toutous qu’elle crochetait, ses proches lui ont recommandé de les vendre. Elle a donc démarré une boutique sur Etsy, sans attentes précises. Le succès fut instantané. Elle en a même vendus partout dans le monde: Australie, États-Unis, Angleterre, Suisse…
«J’ai eu la piqûre de la gestion d’une petite entreprise. Je trouvais ça génial de gérer mon horaire et de servir mes propres clients. Ça m’a aussi procuré un petit revenu d’appoint qui m’a permis de conserver une certaine autonomie. Car dépendre de quelqu’un 100% du temps, financièrement parlant, c’est décourageant. Surtout quand tu es jeune.»
Si son artisanat lui a permis de bâtir sa confiance en elle, Roxanne a toutefois dû admettre qu’il ne lui permettrait pas de gagner un revenu décent à long terme. «Même si mes toutous sont beaux et populaires, ils prennent beaucoup de temps à confectionner. Et si je veux en vendre, ils doivent demeurer à prix raisonnables. Au final, j’ai réalisé que je ne gagnais pas très cher de l’heure…»
Un avenir prometteur
Au fond d’elle, elle savait qu’il lui fallait trouver un moyen plus réaliste d’intégrer le marché du travail pour être capable de subvenir à ses besoins. «Avant de faire mon cours en santé animale, j’en avais fait un en langage médiatique, où j’avais été initiée aux logiciels Photoshop, Illustrator et au graphisme. On faisait de la photo, du cinéma. J’avais vraiment aimé ça.»
«Une de mes amies s’est rappelée que j’aimais m’amuser avec ces programmes-là et m’a demandé de lui concevoir un logo. J’ai vite retrouvé la piqûre et j’ai fini par me dire que je pourrais peut-être faire ça dans la vie.»
Elle en a discuté avec son conjoint, qui l’a aussitôt encouragée à aller de l’avant. Elle a alors amorcé une formation à distance. Elle a obtenu son diplôme en mai dernier. Dans les semaines suivantes, elle mettait sur pied son entreprise de graphisme: Panga Créations.
«Je me suis lancée dans le vide, en ne sachant pas si ça fonctionnerait. Je n’avais rien à perdre: j’avais juste hâte de commencer et d’avoir une vie plus normale.»
Depuis, sa liste de clients se bonifie continuellement, à son grand bonheur. En parallèle, la jeune entrepreneure continue de fabriquer ses toutous, mais à un rythme moins effréné: «J’en fais quand ça me tente, parce que j’aime encore ça. Mais je consacre plus d’énergie à Panga, car je veux que ça marche et que ça évolue sur du long terme», conclut-elle.