Les lockoutés demandent une intervention du premier ministre
LOCKOUT. Après 13 mois et demi de conflit, les lockoutés d’ABI ont fait le point, samedi après-midi, en assemblée générale, où les membres ont donné un mandat unanime aux membres à l’effet de demander un arbitrage accéléré, au cours duquel un arbitre pourrait rédiger lui-même un contrat de travail. Un processus qui requiert normalement l’assentiment des deux parties.
Devant l’intransigance d’Alcoa qui a annulé toutes les journées de négociation et rejeté du revers la main la perspective d’un arbitrage pour dénouer le conflit, les Métallos demandent maintenant une rencontre avec le premier ministre.
Ce dernier, plaide le Syndicat, doit intervenir pour corriger le déséquilibre des forces en présence, alors qu’Hydro-Québec finance le lockout de la multinationale américaine, à raison de 165 millions en 2018 seulement.
« Lors de la dernière campagne électorale, François Legault avait indiqué son intention de faire du règlement du conflit à l’aluminerie de Bécancour une priorité. Force est de constater qu’il n’a pas encore joué le rôle de leadership qu’il disait attendre d’un gouvernement alors qu’il était en campagne électorale », déplore le président de la section locale 9700 des Métallos, Clément Masse.
En septembre dernier, François Legault avait déclaré « Huit mois, c’est mauvais pour les 1000 familles et c’est mauvais pour les commerçants du coin. Il est vraiment temps qu’il y ait du leadership de la part du gouvernement ».
« Après plus de 13 mois, c’est d’un vrai leadership gouvernemental dont on a besoin pour rétablir l’équilibre, Alcoa se moque de ses travailleurs, se moque du gouvernement, se moque de la société qui lui permet de prospérer avec ses trois alumineries », ajoute Clément Masse.
La compagnie a non seulement rejeté catégoriquement la demande d’arbitrage, elle a aussi jeté un discrédit sur l’hypothèse de règlement envisagée par le ministre, avant même qu’elle ne soit formulée, en soutenant que «les processus alternatifs ne sont pas les solutions appropriées pour résoudre le conflit».
« Si l’arbitrage n’est pas une option, si les processus « alternatifs » ne sont pas une solution et que les négos sont annulées, il reste quoi? L’imposition unilatérale de la position patronale. C’est contraire au principe même d’une négociation de bonne foi, soulignent les Métallos.
La multinationale américaine Alcoa opère trois alumineries au Québec, à Bécancour (en partenariat avec Rio Tinto qui possède 25,1 % des parts), Deschambeault et Baie-Comeau. Elle bénéficie pour ce faire d’avantageux contrats d’hydroélectricité avec Hydro-Québec et le gouvernement du Québec.
Or, le contrat qui lie l’aluminerie de Bécancour et Hydro-Québec prévoit qu’un lockout puisse être considéré comme un cas de force majeure, ce qui dispense la compagnie de payer pour le bloc d’énergie qui lui est réservé, ce qui a causé une perte financière de 165 millions pour Hydro-Québec en 2018.
« En plus du manque à gagner pour Hydro-Québec, les pertes économiques sont énormes pour les familles des lockoutés, pour l’économie de la région et même du Québec. Le principe des tarifs avantageux aux aluminerie, c’est de favoriser l’emploi et les retombées économiques qui s’ensuivent. Alcoa brise le pacte qui l’unit à la société québécoise et au gouvernement. Le premier ministre doit agir et s’intéresser personnellement au dossier. C’est un enjeu économique important qui dépasse les seules frontières des relations de travail », poursuit Clément Masse.