Quelques têtes derrière la conception du pont Laviolette
RENCONTRE. Norman Morantz et Denis Laplante font partie des grands manitous ayant rendu possible la construction du pont Laviolette. Alors que le premier en a été le concepteur principal, son collègue a accompli de véritables petits miracles, en termes de calculs, afin de résoudre certaines difficultés qui se sont présentées en cours de projet.
Le 14 décembre dernier, à l’hôtel de ville de Trois-Rivières, les deux hommes se sont retrouvés pour prendre part à la réception civique commémorant la mise en service du pont, le 20 décembre 1967. En discutant avec eux, un constat s’impose rapidement: la cinquantaine d’années qui ont passé depuis qu’ils ont œuvré ensemble à la conception du pont n’a en rien atténué leur franche camaraderie! «Ce sont de bons souvenirs de jeunesse», lance Denis Laplante, sourire aux lèvres.
D’un côté comme de l’autre, on perçoit une admiration mutuelle. «Norman, c’est le père de la partie complexe, la charpente métallique, mentionne M. Laplante. Il mériterait aussi un prix de la Loi 101, car quand j’ai commencé à travailler avec lui, en 1964, il ne parlait pas du tout français!»
«Denis a fait des calculs très fastidieux, et bien d’autres choses également», souligne pour sa part M. Morantz dans un français fluide, évoquant notamment la problématique complexe liée à la connexion des gouttières, résolue par M. Laplante.
Les deux complices étaient âgés dans la mi-vingtaine lorsqu’ils ont commencé à plancher sur ce projet d’envergure. Au moment de leur embauche, chacun venait de terminer ses études en ingénierie à Londres, en Angleterre.
Norman Morantz a été le premier à joindre l’équipe de Georges Demers, à qui le gouvernement du Québec avait confié le projet. Il a participé au processus de conception préliminaire, visant à déterminer l’emplacement du pont et le type de structure à bâtir. Il a aussi travaillé aux plans et à la conception du pont final. «J’ai été là du commencement jusqu’à la fin», indique celui qui a pensé de A à Z la partie supérieure en acier.
Deux ans plus tard, c’était au tour de M. Laplante de faire son arrivée dans le projet. «J’ai d’abord travaillé sur les goussets, c’est-à-dire les plaques sur lesquelles se boulonnent les différentes membrures des éléments de charpente. C’est long et fastidieux à calculer! Par la suite, on m’a confié la réalisation des joints de dilatation (des joints à plaque), et j’ai hérité du calcul de tous les planchers du pont.»
Dans l’harmonie
Le projet était fractionné, racontent les deux hommes. «Chacun avait sa tâche. On avait une belle équipe. Tout s’est fait dans l’harmonie», indique Denis Laplante.
Georges Demers a su s’entourer d’un judicieux mélange d’ingénieurs, jeunes et plus expérimentés, tous Québécois, rappelle pour sa part Norman Morantz: «Ce pont, on l’a vraiment fait dans l’esprit de M. Lesage (NDLR: Jean, premier ministre du Québec): Maîtres chez nous. Nous l’avons réalisé avec des gens d’ici. On a rassemblé l’expertise nécessaire, que ce soit à Montréal, Québec ou ailleurs, pour mener complètement à bien ce projet par nous-mêmes.»
Avant qu’il ne revienne à Trois-Rivières, la semaine dernière, M. Morantz n’avait pas eu l’occasion d’emprunter le pont Laviolette depuis une vingtaine d’années. Il s’est dit agréablement surpris de son excellente condition générale. «C’est formidable, car en tant que Montréalais, j’ai vu le pont Champlain se détériorer année après année.»