Déclin de la perchaude: la pêche n’est pas en cause

PÊCHE. Une nouvelle étude prouve que le déclin de la population de perchaudes est dû à la diminution de nourriture dans le lac Saint-Pierre, ce qui empêcherait les poissons naissants de grossir suffisamment pour survivre à leur premier hiver.

Cette étude est publiée deux ans après que le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec (MFFP) ait imposé un moratoire de cinq ans de la pêche à la perchaude au lac Saint-Pierre afin de lutter contre le déclin de la population du poisson. Elle a été menée en collaboration entre le ministère, Environnement Canada et l’Université du Québec à Trois-Rivières en 2013. Les résultats ne sont connus que depuis quelques mois.

L’habitat de la perchaude s’est transformé. En raison de l’écoulement du phosphore qu’on retrouve dans les engrais et le réchauffement de la température de l’eau, les cyanobactéries (algues bleues) se sont développées dans le cours d’eau.

Le lac Saint-Pierre regorgeait d’herbiers, la principale nourriture des perchaudes. Toutefois, les algues bleues ont pris la place des herbiers.

«La perchaude n’a plus de protection, ni de garde-manger. C’est ça qui est dramatique», résume le responsable du comité de suivi des stocks de perchaudes et professeur titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écologie des eaux douces, Pierre Magnan.

«Le problème est la relève. Il n’y en a pas. La reproduction va très bien. Il faut que le poisson atteigne 7 cm au mois de novembre pour puiser dans ses réserves énergétiques durant la saison froide. Il mange peu durant l’hiver», explique-t-il.

Il y a de nombreuses années, la perchaude pouvait atteindre 8 ou 9 cm avant l’hiver. Selon des données recueillies dans un projet connexe, des centaines de milliers de larves éclosent tous les ans.

«Au printemps suivant, il n’y a presque pas de perchaudes âgées d’un an. Ce n’est pas suffisant pour repeupler. La population va mourir d’elle-même. Ce n’est pas juste une question de surexploitation», croit-il.

Des solutions

Selon le chercheur, la meilleure solution est de diminuer au maximum l’utilisation d’engrais en agriculture.

«Depuis des années, les agriculteurs ont fait beaucoup d’efforts et ont diminué les engrais. Il ne faut pas les mettre sur le banc des accusés. Toutefois, je crois qu’il reste encore des efforts à faire», mentionne-t-il.

Le ministère a confirmé qu’il maintenait le moratoire sur la perchaude jusqu’en 2017, malgré les résultats de l’étude.

«Les données sont encore à l’analyse. De notre côté, on maintient le moratoire. La présence de phosphore dans le lac ne relève pas du ministère de la Faune, mais celui du ministère de l’Environnement», a souligné le porte-parole, Jacques Nadeau.

La porte-parole du ministère de l’Environnement, Geneviève Lebel, a répondu que le ministère voit à l’application des mesures légales et réglementaires déjà en place.

«Le respect de la politique de protection des rives […] concernant les matières fertilisantes et les pesticides et à la protection des milieux humides doivent constituer une priorité pour les riverains et tous les utilisateurs», ajoute-t-elle.