La PDG de Radio-Canada, Catherine Tait, refuse d’écarter une prime au rendement

OTTAWA — La présidente et directrice générale sortante de CBC et Radio-Canada, Catherine Tait, refuse de s’engager à écarter toute prime au rendement ou indemnité de départ. Or, dans ce deuxième cas, aucun montant n’est prévu d’être versé, affirme une source gouvernementale.

Mme Tait n’a pas apporté cette précision elle-même quant à une indemnité de départ. Elle a plutôt contourné lundi chaque invitation du député conservateur Damien C. Kurek à décliner de telles sommes alors qu’elle témoignait en comité parlementaire. Celui-ci en a fait une question de respect envers les contribuables qui peinent à joindre les deux bouts.

«Je considère cela comme étant une affaire personnelle et je crois que je suis protégée par la loi sur la protection de la vie privée à ce sujet», a soutenu celle dont le mandat vient à échéance en janvier prochain.

Questionnée en mêlée de presse à savoir pourquoi elle refusait de prendre un tel engagement, elle a plaidé qu’elle n’avait pas à divulguer ses intentions.

«Le rôle de la PDG, c’est d’expliquer aux Canadiens et Canadiennes la valeur du diffuseur public. Ce n’est pas de donner des détails sur ma vie personnelle», a-t-elle dit.

Une source gouvernementale a tenu à clarifier qu’aucune indemnité de départ n’existe dans un cas comme celui de Mme Tait. «Il est trompeur, inexact et irresponsable de la part du Parti conservateur de soulever la présence d’indemnité de départ. (…) Dans la fonction publique, des indemnités peuvent être versées si un emploi est coupé, ce qui n’est pas le cas ici», a signalé cette source qui s’est exprimée sous le couvert de l’anonymat puisqu’elle n’était pas autorisée à parler publiquement de cette question.

Durant son témoignage, Mme Tait a défendu la rémunération au rendement pour les cadres, de façon générale. «Je crois que les Canadiens s’attendent à ce que la société respecte ses engagements envers ses employés non syndiqués, tout comme ses employés syndiqués.»

Mme Tait a répété à plusieurs reprises que les primes de rendement des cadres, qui sont de 18 millions $ pour l’année civile 2024, sont déterminées en fonction d’objectifs clairs qui doivent être atteints ou dépassés.

La PDG a en outre affirmé que les cadres de CBC et Radio-Canada gagnent nettement moins que ceux du secteur privé.

«La rémunération totale de nos cadres est à 50 %, même moins, que dans le secteur privé», a-t-elle dit.

Néanmoins, Mme Tait a fait valoir que, pour répondre aux préoccupations quant à la rémunération des dirigeants et gestionnaires de CBC et Radio-Canada, un examen indépendant externe a été commandé.

Les députés libéraux, néo-démocrates et bloquiste membres du comité qui entendait lundi la PDG ont aussi critiqué les primes au rendement.

Le libéral Michael Coteau a par exemple soutenu qu’il était difficile pour les Canadiens qui peinent à composer avec le coût de la vie d’accepter que 18 millions $ soient versés aux cadres du diffuseur public.

Le bloquiste Martin Champoux a soutenu que le modèle de rémunération devrait être revu et la néo-démocrate Niki Ashton a lancé que les bonis nuisent à la réputation de CBC et Radio-Canada.

Les élus ont aussi questionné Mme Tait sur les frais d’hébergement et déplacement qui lui ont été remboursés durant les Jeux olympiques à Paris. Selon des documents disponibles en ligne, près de 4000 $ en hébergement ont été facturés par Mme Tait et le «National Post» a précisé que cette dépense était pour quatre nuits seulement.

«Dans le cadre de mon travail, être à l’ouverture des Olympiques était absolument attendu de moi», a dit Mme Tait.

Cette dernière a écourté des vacances personnelles en France pour se rendre à l’événement couvert par le diffuseur public. Elle a précisé n’avoir facturé aux contribuables que son trajet en train et ses quatre nuits d’hôtel.

Le prix moyen d’une nuitée a grimpé en flèche à Paris durant les Jeux olympiques, passant à environ 700 euros, soit l’équivalent d’un peu plus de 1000 $.

Mme Tait a reproché à certains membres du comité de répandre des faussetés, comme en affirmant qu’elle a fait payer les contribuables pour ses vacances personnelles.

La PDG a aussi voulu rectifier le tir sur les coupes à CBC et Radio-Canada sous sa gouverne. «Ces six dernières années, 90 postes ont été perdus au diffuseur public. Chaque perte d’emploi est vraiment, vraiment difficile. Au cours des 10 années précédentes, 1085 emplois ont été perdus.»

Mme Tait estime aussi que le ton et la façon de la questionner de plusieurs membres du comité visaient à la discréditer.

La dirigeante s’est en outre montrée inquiète de l’avenir pour CBC et Radio-Canada alors que plusieurs voix s’élèvent pour définancer le diffuseur public, une promesse que font les conservateurs.

Elle considère qu’il serait impossible de couper les vivres à CBC sans pénaliser Radio-Canada, comme le chef conservateur, Pierre Poilievre, estime pouvoir faire.

Mme Tait nie avoir, durant son mandat, «cherché la bataille avec quiconque». «Mon travail est de défendre un diffuseur public fort», a-t-elle dit.

Elle a affirmé à plusieurs reprises que 73 % des Canadiens croient que le diffuseur public est la source d’information la plus crédible et fiable.