Une saison d’adaptation en canoë pour Yves Bourque

BÉCANCOUR.  La dernière saison de paracanoë n’a pas été la meilleure d’Yves Bourque, alors qu’il a dû faire une croix sur son désir de participer aux Jeux paralympiques de Paris cet été. Malgré la déception, l’athlète n’entend pas accrocher sa rame et poursuivra à livrer les efforts comme il a toujours su le faire.

« Je n’ai pas fait les chronomètres que je voulais faire. Cependant, du côté de la technique, j’ai fait des gains », révèle le Bécancourois. Une partie des difficultés de sa saison de canoë s’explique par des changements et des essais avec son siège de canoë et ses rames qui lui ont nui à court terme, mais qui pourraient être plutôt payants à moyen et long terme. « Quand on pratique du sport de haut niveau et qu’on veut aller chercher le meilleur, on va risquer des changements, mais parfois, les changements ne sont pas concluants », croit-il.

« J’avais coupé l’appui au-devant de mon siège pour être capable d’aller chercher plus d’angles en avant, pour aller chercher plus de longueurs. Cependant, ça a créé un trop grand déséquilibre », explique l’athlète.

Sa déception vient également du fait qu’il avait eu une très belle saison en entrainement. Il avait passé deux semaines en Floride en mars dernier pour s’entrainer, les cours d’eau ont été accessibles tôt dans la saison et sa forme était à son meilleur, sans aucune blessure pour venir jeter une ombre au tableau. Et l’absence de blessure en sport de haut niveau, ce n’est pas si fréquent, selon Yves Bourque!

Son objectif était de participer aux Jeux paralympiques de Paris. Même si son rêve ne s’est pas concrétisé, il demeure tout de même deuxième au Canada, derrière son ami d’entrainement, Mathieu St-Pierre. « Je suis vraiment content pour lui. Mathieu travaille fort. C’est un athlète exceptionnel », assure-t-il.

À 58 ans, Yves Bourque a décidé de ne plus se mettre de la pression inutilement. « C’est un sport qui est difficile physiquement. J’ai eu beaucoup de douleurs aux épaules », révèle M. Bourque. Il ne souhaite pas sauter d’étapes pour la prochaine saison et pense tout d’abord à se qualifier pour l’équipe nationale, ce qu’il n’avait pas été en mesure de faire cette année, soit d’atteindre la barre des 56 secondes au 200 mètres. « Après ça, on verra! », lance-t-il.

Un passionné de sports

Maintenant que la saison de canoë est terminée, c’est le retour à l’entrainement pour le paraski pour Yves Bourque.

Le sport est rapidement entré dans la vie d’Yves Bourque, et personne ne lui a jamais imposé de limites. Il n’aurait d’ailleurs jamais laissé personne lui en imposer. Toutefois, lorsqu’il était jeune, il n’existait pratiquement que le basketball dans le monde des parasports, ce qui n’intéressait pas M. Bourque. Il s’amusait donc à faire des courses sur son skateboard. « Je partais du premier rang et je descendais au village le plus vite possible. J’étais toujours en compétition avec moi-même », se rappelle-t-il.

Lorsqu’il a découvert qu’il était capable de pratiquer le ski de fond et qu’il était relativement performant, capable de suivre ses amis, ça a été le déclic. « En plus, j’aime l’hiver et le froid! ». C’est vers 2009-2010 qu’il a participé à ses premières compétitions internationales, pour finalement se qualifier à deux reprises aux Jeux paralympiques d’hiver, à Sotchi en 2014 et à Pyeongchang en 2018. Il souhaiterait se qualifier une dernière fois en 2026.

Il pratique également le bateau-dragon, la course, le vélo. Rien n’arrête Yves Bourque.

Les ravages de la thalidomide

Yves Bourque a déposé une demande d’indemnisation en avril 2019 pour les personnes victimes de la thalidomide. La thalidomide est un médicament prescrit aux femmes enceintes à la fin des années 50 et au début des années 60 pour combattre la nausée et qui a été à l’origine d’importantes malformations congénitales.

À la maison d’Yves Bourque, à qui il manque les deux jambes, cela a toujours été un sujet tabou. On n’en parlait pas.

S’il n’avait pas déposé de demande avant, c’est que les dates couvertes par le programme fédéral d’indemnisation arrêtaient en 1965, alors que M. Bourque est né en 1966. Lorsque finalement certains critères ont été modifiés et que les années 1966 et 1967 ont été ajoutées, le Bécancourois a décidé d’aller de l’avant.

Après le passage de trois ministres de la Santé différents à Ottawa depuis la demande de M. Bourque, elle a été rejetée à plusieurs reprises. On lui a répondu qu’il n’était pas éligible parce que physiquement, il ne correspond pas « à ce qu’eux-autres pensent que la thalidomide peut causer comme dégât physique ». Et quels sont ces critères? « Ils sortent un peu n’importe quoi, je dirais, déplore-t-il. J’ai tellement vu et entendu de choses avec eux-autres, c’est l’enfer! Ils disent que j’aurais dû avoir des malformations au haut du corps, mais en même temps, le même généticien a déjà écrit des articles qui mentionnent que ce n’est pas possible de déterminer les malformations futures des embryons. »

M. Bourque fait désormais affaire avec une avocate afin de se rendre à la Cour fédérale pour faire progresser le dossier. Il est en attente de nouvelles. « C’est interminable, mais j’ai tellement mis d’énergie là-dedans que je vais aller jusqu’au bout », conclut Yves Bourque.