Hockey Canada confirme l’existence d’un fonds pour couvrir notamment les abus sexuels
TORONTO — Hockey Canada a confirmé, mardi, dans un communiqué, qu’il conserve un «fonds national d’équité» qui couvre un «large éventail de dépenses liées aux initiatives de sécurité, de bien-être et d’équité dans notre organisation».
L’organisme national du sport est au centre d’une controverse depuis qu’une affaire d’agression sexuelle présumée survenue lors d’un gala en 2018 à London, en Ontario, impliquant huit joueurs non identifiés — dont des membres de l’équipe canadienne junior de cette année-là — et un règlement à l’amiable ont éclaté en mai.
La Presse Canadienne avait questionné Hockey Canada par courriel, lundi, au sujet d’un affidavit déposé devant un tribunal de l’Ontario suggérant qu’elle détenait un fonds de réserve pour couvrir les responsabilités non assurées, y compris les réclamations pour abus sexuels.
Cette information est incluse dans un affidavit de juillet 2021 signé par Glen McCurdie, qui était alors vice-président des assurances et de la gestion des risques à Hockey Canada, dans le cadre d’une poursuite intentée par un joueur blessé en Ontario.
«Le fonds est également utilisé pour payer les primes d’assurance de l’organisation et pour couvrir toute réclamation non couverte par les polices d’assurance, y compris celles liées aux blessures physiques, au harcèlement et à l’inconduite sexuelle», précise la fédération dans un communiqué.
Hockey Canada a ajouté que le fonds a été «établi d’une manière compatible avec les fonds de réserve maintenus par d’autres grandes organisations nationales.»
Appelé à commenter ce nouveau rebondissement dans le dossier, le premier ministre Justin Trudeau a jugé inacceptable le comportement des responsables de Hockey Canada.
«C’est difficile pour tout le monde au Canada de croire et d’avoir confiance envers quelqu’un à Hockey Canada, a soupiré M. Trudeau lorsque questionné à ce sujet dans le cadre de l’annonce de la prolongation du Plan de protection des océans sur l’Île Bowen en Colombie-Britannique.
«Ce que nous avons appris aujourd’hui est totalement inacceptable, et c’est la raison pour laquelle nous avons gelé il y a quelques semaines le financement versé à Hockey Canada.»
Scott Smith, président et chef de la direction de Hockey Canada, et le chef de la direction sortant, Tom Renney, ont dû s’expliquer devant les parlementaires du Comité permanent du patrimoine canadien le mois dernier sur l’agression présumée et la provenance des fonds du règlement.
McCurdie, qui a pris sa retraite en décembre, n’a pas assisté à la procédure en raison du décès de son père, mais a été convoqué par le comité pour une prochaine série de réunions qui devraient commencer mardi prochain.
L’organisation a publié jeudi une lettre ouverte soigneusement rédigée contenant un certain nombre de promesses, notamment l’engagement de rouvrir une enquête indépendante sur l’agression présumée et un examen complet de la gouvernance.
De nouvelles révélations
Le quotidien The Globe and Mail révèle par ailleurs dans son édition de mardi qu’au lendemain de la rencontre dans une chambre d’hôtel qui a mené à la poursuite pour agression sexuelle, un joueur de l’équipe canadienne de hockey junior aurait échangé des messages textes avec la victime présumée.
Le joueur lui aurait demandé si elle était allée voir la police.
La femme aurait dit qu’elle en avait parlé à sa mère, et que celle-ci avait ensuite appelé la police contre son gré.
«Tu as dit que tu avais du plaisir», aurait écrit le joueur.
«J’étais vraiment ivre, je ne me sentais pas bien du tout après. Mais je n’essaie pas de causer des ennuis à qui que ce soit», aurait-elle répondu.
«J’étais d’accord pour rentrer avec toi, tous les autres après je ne m’y attendais pas. J’avais juste l’impression qu’on se moquait de moi et qu’on profitait de moi», aurait-elle poursuivi.
L’échange de messages textes a été présenté au Globe and Mail par les avocats des sept membres anonymes de l’équipe canadienne. Les avocats ont également montré au journal deux extraits vidéo enregistrés cette nuit-là qui, selon eux, montrent que la relation sexuelle était consensuelle et que la plaignante n’était pas craintive, intimidée ou en état d’ébriété, comme elle l’aurait affirmé.
L’avocat de la présumée victime a refusé de commenter, citant les enquêtes en cours. Dans sa déclaration, déposée en avril 2022, elle a allégué qu’on lui aurait ordonné de déclarer qu’elle était sobre lors de l’enregistrement vidéo.
Les avocats des joueurs ont affirmé avoir fourni les messages textes et les vidéos montrés au Globe and Mail à la police de London en 2018. L’enquête policière s’est terminée sans inculpation en février 2019, ont avancé les avocats, après que le détective principal ait déclaré qu’il n’avait pas des motifs raisonnables de croire qu’une agression sexuelle avait été commise. La police de London a refusé de commenter les détails de l’enquête.
De plus en plus de joueurs nient toute implication
Lundi, le défenseur Conor Timmins des Coyotes de l’Arizona, membre de l’équipe junior en 2018, a nié son implication dans l’agression présumée.
«Personne n’allègue que j’étais présent ou impliqué et je n’ai aucune connaissance personnelle de ce qui s’est passé, a déclaré Timmins dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux par son agence, Quartexx Hockey. J’ai pleinement coopéré à l’enquête initiale de Hockey Canada et je continuerai de coopérer à toute autre enquête au besoin.»
Victor Mete, récemment mis sous contrat par les Maple Leafs de Toronto, a publié le mois dernier une déclaration niant toute implication. L’ex-défenseur du Canadien de Montréal a précisé qu’il était à l’extérieur du pays pour des vacances en famille au moment du gala à London en 2018.
Le défenseur Cale Makar de l’Avalanche du Colorado, vainqueur du trophée Conn Smythe, a déclaré aux journalistes à Denver avant la finale de la Coupe Stanley qu’il ne faisait pas partie du groupe de huit joueurs en question.
L’agent de l’attaquant Jonah Gadjovich des Sharks de San Jose a dit que son client n’était pas impliqué.
Les attaquants des Blues de St. Louis Robert Thomas et Jordan Kyrou ont eux aussi nié toute implication.
«Je suis au fait des allégations contre certains membres d’Équipe Canada junior en 2018. Je trouve important de partager ma réponse à ces allégations», a écrit Thomas sur Twitter, mardi.
«Je n’ai pas été impliqué, et je n’ai pas été témoin, du prétendu incident. Je suis prêt à coopérer avec l’enquête de la LNH ainsi que celles qui seront appropriées, et nécessaires. Je n’émettrai pas d’autres commentaires à ce sujet», a-t-il ajouté.
Sur Twitter également, Kyrou a écrit ceci:
«Je veux clairement affirmer que je n’étais pas au gala ni à London, au moment du prétendu incident. Je suis prêt à coopérer avec toute autre enquête si nécessaire. Vu les enquêtes en cours, je ne ferai pas d’autres commentaires publics.»
L’agent de Sam Steel, centre avec les Ducks d’Anaheim, a dit dans un communiqué que son client «n’a pas participé à quelque inconduite que ce soit qui a été décrite dans les médias».
Taylor Raddysh, ailier avec les Blackhawks de Chicago, a lui aussi nié toute implication, dans un message sur Twitter.